vendredi 29 juin 2007

Emma, Geri, les deux Mel et Victoria (première partie)


1996. Avec le recul, il est difficile de croire que cette année a existé. Après tout, c'était l'époque où le président américain était considéré comme étant cool, l'essence était à 59,9 sous le litre, on surfait dans le Web avec des connexions téléphoniques et à l'aide de Netscape... et le sauveur de la cause indépendentiste n'était pas une femme blonde.

Mais je peux témoigner que cette époque a bel et bien existée: j'étais au cégep et c'était une époque où j'étais un fidèle auditeur des radios commerciales montréalaises.

(Et, quand je repense à cette époque où j'écoutais CKOI ou CKMF sans brocher pendant des heures, j'ai à la bouche la même phrase que s'exclame le baby-boomer qui regarde ses vieilles photos de 1978 où il est en pantalon en cuir pattes d'éléphants et en chemise déboutonnée à moitié, afro sur la tête et cigarette au bec: "Mais j'avais donc ben de l'air fou!")

Je roulais dans les rues de Saint-Constant dans une bagnole déglingée qui m'avait été donné par mes parents — nominalement, une adorable Chevrolet Cavalier 1986 rongée par la rouille, avec la porte du côté conducteur qui ne barrait pas.

C'est ainsi que j'ai appris, par la bouche même de l'animateur de CKOI, que LA révélation musicale de l'heure, le groupe à ne pas manquer, le hit de l'été, la bombe totale, allait jouer dans quelques secondes.

(Bon, il n'y avait pas de quoi en faire un plat, les ondes FM commerciales m'avaient à l'époque déjà contraint à remettre systématiquement en question les superlatifs positifs utilisés par les voix de Gino qui faisaient office d'animateur. Le superlatif positif utilisé comme verbe, nom, conjonction et adverbe. Le superlatif positif utilisé pour masquer — ou simuler? — des majeures lacunes de français. Tout est bon, va être bon, sera incroyable, va être à surveiller sur les palmarès, en grosse demande spéciale. J'ai bien hâte au jour où un technicien mal intentionné versera du sérum de vérité dans le café d'un animateur. Nous aurions droit à des propos frais et inédit sur les ondes montréalaise, tel que Dans quelques instants, on va vous faire jouer une toune de Dany Bédar... ceux qui connaissent la musique savent que cette toune-là est de la grosse schnoutte. Mais bon, vous arrêtez pas de la demander je-ne-sais-trop-pourquoi alors on est pogné pour la faire jouer. Fin de la parenthèse qui traduit bien mon enthousiasme à taper ce blogue.)

Le futur groupe de l'heure était donc un groupe de cinq jeunes britanniques dans le vent qui était en train de prendre d'assaut les palmarès de la noble Albion. Elles étaient cinq, se faisaient appeler Spice Girls et le premier simple du groupe, Wannabe, allait être la chanson de l'été. Pffffffft. Les animateurs radotaient cette poutine pour toutes les nouvelles chansons, même les chansons qui peinaient à se rendre dans le Top 30 après deux semaines de promotions intensives.

Mais il en va des prédictions d'animateurs radios surexcités comme des prédictions d'astrologues: il en disent tellement qu'ils finissent par avoir raison au moins une fois.

Et qu'est-ce qu'il ont eu raison! Merde, pas moyen de ne pas tomber sur un poste de radio qui ne faisait pas jouer Wannabe. Pas moyen de tomber sur un poste où il n'y avait pas d'auditeur/trices quelque peu lobotomisé passer en ondes d'une radio FM commerciale pour demander cette chanson. C'était bien pire à MusiquePlus, où le vidéo était en rotation continue, question de faire exploser l'audimat en montrant cinq jeunes canons de beautés british en cavale... et en jolie tenue.

Qu'est-ce qu'elles pouvaient m'énerver, les Spice Girls! Wannabe est une chanson criarde que je n'étais pas encore capable d'entendre sans avoir des poussées de boutons. Et elles étaient partout, tout le temps sur les ondes de n'importe quelle radio!

Je prenais toutefois mon mal en patience: j'étais persuadé que les Spice Girls était un one-hit wonder, un autre de plus dans le grand cimetière de l'histoire de la pop.

J'allais me tromper de manière magistrale.

(À lire dans la deuxième partie: comment un vidéoclip-hommage à Russ Meyer et la meilleure amie du bloggeur ont converti le bloggeur à la cause du Girl Power.)

3 commentaires:

Blogueuse Cornue a dit...

Ton billet m'a fait bien rire...

Comme quoi tout peut avoir une deuxième vie :-/

Eve Martel a dit...

Je suis allé voir le film des Spice girls EN SALLE parce que mon meilleur ami, qui était fan, m'avait demandé de l'accompagner. C'est ça, la vraie amitié.

Cinoche78: a dit...

@Emilie: C'est la tendance dans l'industrie de la musique: tous les groupes qui ont eu leur cinq minutes de gloire dans les années 80 et 90 se reforment. (À ne pas manquer la semaine prochaine: le reformation des B.B. et de Nuance.)

@Eve: Wow. Si votre amitié tient encore après qu'il ait offert de regarder ce Tchernobyl cinématographique, c'est que vous êtes fait l'un pour l'autre. ;-)